Le projet

Le contexte scientifique et technique

La ressource fourragère tirée des arbres est encore peu étudiée et soulève des questions concernant l'éventail de leur valeur alimentaire, leur acceptabilité par les animaux, et les itinéraires de production. Les études scientifiques s’intéressant à la valeur alimentaire des feuilles de ligneux (arbres, arbustes ou lianes) sont encore peu nombreuses en Europe (e.g. Smith et al., 2014 ; Emile et al. 2017 ; Luske and Van Eekeren, 2018). Les recherches ont, jusqu’à présent, surtout concerné des fourrages ligneux caractéristiques des systèmes pastoraux de la zone méditerranéenne (Meuret, 1986 ; Mosquera-Losada et al., 2004 ; Papanastasis et al. 2008, Mebirouk-Boudechiche et al., 2015) zones tropicale (Alonso-Diaz et al., 2008 ; Vu et al., 2011). Le manque de références sur la valeur nutritive des essences d’arbre en milieu tempéré constitue un frein pour le développement de leur utilisation (Hermansen et al., 2015). Les premiers résultats obtenus dans le cadre des projets PARASOL et ARBELE et présentés dans Emile et al. (2017) sur les teneurs en matières azotées totales (MAT), fibres, tanins condensés (TANc) et digestibilité in vitro des feuilles de 27 espèces ligneuses, méritent d’être complétés en incluant de nouvelles essences et en considérant non seulement la feuille mais également les jeunes tiges ou brindilles aussi consommées par les animaux.

Bien que traditionnellement utilisé comme fourrage d’appoint en cas de sécheresse, il n’existe pas de tables de production des arbres hors forêt. En particulier, il n’y a pas de références sur les parties feuilles et rameaux, consommables par les animaux. La quantité produite dépend de l’arbre, de son âge, du contexte pédoclimatique et du mode de gestion (Colin et al., 2018). Des enquêtes menées auprès d’éleveurs lors des projets ARBELE et PARASOL (Béral, 2018), nous permettent d’approcher quelques notions de productivité et d’apport aux animaux. Ainsi, les mûriers dans le sud de la France peuvent apporter des compléments après les estives fin août et à l’automne (entre 10 et 20 % de la ration). Cependant il n’existe pas de tables de production pour les arbres recépés ou étêtés régulièrement par exemple, et pour la multitude d’espèces ligneuses pouvant être pâturées. Les questions essentielles sur le nombre d’arbres à planter ou à gérer ainsi que la prise en compte des besoins des animaux selon les périodes restent entières.

Le contexte territorial

Le projet s’inscrit sur une diversité de territoires (Auvergne, Cévennes, Ain, Ariège, Ardèche, Vienne) concernés par des contextes pédoclimatiques et des pratiques d’élevage différentes. Sur la plupart d’entre eux, le frêne "émonde », ou le mûrier têtard est/était très présent sur les exploitations d'élevage, les exploitants coupant les branches feuillées pour nourrir les animaux les années de sécheresse (2003, 2011, 2015, 2016, 2017). Sur chacun de ces territoires, des dynamiques de développement et d’expérimentation (sites pilotes) sur l’arbre fourrager ont émergé et constitue le socle expérimental de RAME.

Objectifs

A partir de l’étude du potentiel fourrager des arbres, le projet a pour ambition de concevoir à l’échelle des fermes, des aménagements agroforestiers pour la production d’une ressource fourragère arborée permettant d’augmenter la résilience climatique et économique des systèmes d’élevage ruminants (ovins, bovins, caprins).

Besoins des populations / consommateurs

Agroof, Mission Haie Auvergne ou encore l’IDELE observent une demande croissante d’accompagnement technique de la part des éleveurs sur des pratiques d’affouragement agroforestier. Cette évolution est partagée par un grand nombre des structures de conseils adhérentes de l’AFAC-Agroforesteries. Le potentiel fourrager des aménagements agroforestiers répond à un besoin d’autonomie des élevages ruminants, contribuant à une réduction des achats extérieurs (réduction des GES émis par les transports de marchandises) et à une meilleure adaptation des exploitations au changement climatique. Par ailleurs, l’agroforesterie en élevage contribue à des enjeux plus globaux, et répond à des attentes sociétales, tels que le bien-être animal, le stockage de carbone (mitigation du changement climatique), la biodiversité, la préservation et l’amélioration des paysages.

Innovation

Après PARASOL et ARBELE, ayant identifié le manque de connaissances sur les arbres fourragers et approcher leur potentiel via l’étude de la valeur fourragère d’un certain nombre d’essences, RAME va plus loin en approfondissant les points clés pour l’intégration de l’arbre dans les bilans fourragers et en proposant des aménagements innovants et performants, en co-construction avec les éleveurs tout au long du projet.
Enfin, à travers ses actions de recherches et d’échanges RAME vise à fédérer une dynamique d'expérimentations participatives avec les réseaux d’éleveurs qui serviront sur le long terme à évaluer et améliorer les modèles agroforestiers à vocation fourragère coconstruits entre éleveurs et chercheurs. Ce projet se fait en lien étroit avec les initiatives de recherche territoriales menées dans les projets CLIMAGROF 2 et APACHE.